C'est toi, Corinne, qui commence avec tes souvenirs de Laval. Le couloir, que nous appelions la ruelle, était pavé avec un petit caniveau où passaient les eaux usées de l'arrière et les nôtres. Il y avait intérêt à ce que ce soit propre à cause des odeurs. Il en est passé de l'eau là-dedans ! Au printemps, une glycine pendait à droite en montant, très odorante. A l'automne il fallait balayer les feuilles. Cette ruelle était fermée aux deux extrémités. En descendant, on arrivait sur une placette, et sur la rue principale. Vingt pas peut-être ... En haut, la porte donnait accès à la pompe et un espace où se dressait une grande maison louée par appartements, et tenue comme logeuse par mme Evano, qui parlait un sabir breton-français, et sa fille Mlle Berthe. Tout au bout çà avait dû être la loge. Y vivait une femme âgée mais surtout très sale , où pourtant il m'arrivait d'attendre maman. Elle a volé pour me la donner, une espèce de statue en métal, une laitière avec une grande "buire" de lait. C'était une drôle, la mre Boudier. Les locataires de la grande maison n'avaient pas la droit de passage par la ruelle. Les propriétaires, deux dames âgées, venaient parfois, et nous invitaient à aller les voir. Cà,sentait un mélange de poussière et de dragées. Il y a quelques années seulement que j'ai perdu cette odeur. Enfin il y avait Mr Saurin, qui lui avait droit de passage. Pour arriver chez lui il fallait monter un petit escalier garni de bambou. Papa y coupait ses cannes à pêche. On arrivait dans une maison pleine de meubles en réduction: une chapelle avec des statues, un bureau étroit avec des tiroirs, enfin le carillon qui est à la maison dont il a fait don à maman, qui s'était bien occupée de lui. C'était un célibataire typographe féru de théâtre, où il allait en habit: chapeau, gants beurre frais,. Il avait une collection de cravates. Mr Saurin, et Mr Seguin ( de la chèvre), se confondaient un peu pour moi. Lors de nos réunions de famille, il chantait très bien quelques morceau d'operettes ou d'opéra.
Près de la pompe qu'il fallait actionner plusieurs fois par jour parce que nous n'avions pas l'eau courante, il y avait un magnifique cerisier à fruits blancs, que nous pouvions cueillir.....